Le projet de loi dit de moralisation de la vie politique propose, dans son chapitre 3, de supprimer la réserve parlementaire. Une proposition qui revient régulièrement sur le devant de la scène. Qu'est-ce que la réserve parlementaire ? Il s'agit de sommes d'argent fixes octroyées aux députés et aux sénateurs et que ceux-ci peuvent distribuer selon leur bon vouloir. Système pour le moins opaque et dont l'importance des sommes en jeu laisse rêveur... Chaque député se voit attribuer 130 000 euros par an et 520 000 euros annuels pour un chef de groupe parlementaire soit un montant total de 90 millions pour l'Assemblée Nationale plus les 60 millions attribués aux sénateurs où l'utilisation finale des sommes allouées est encore plus opaque (chiffres 2016). Chaque heureux gagnant de cet étrange loto peut distribuer ces sommes, selon son bon vouloir, dans sa circonscription pour des associations ou des projets divers. On peut facilement imaginer, l'humain étant ce qu'il est, que cette manne (qui n'a rien de céleste) doit permettre au parlementaire de s'acheter sa circonscription à bon prix. La distribution de cet argent public qui donne au distributeur l'aura du bon samaritain laisse songeur... La seule source d'information disponible sur son utilisation, auprès des associations, est le jaune budgétaire (1), document en annexe de chaque projet de loi de finances. Et sa lecture est passionnante... Pour 2016, les parlementaires (députés et sénateurs confondus) ont versé 11 898 901 euros aux associations de leur circonscription soit 10% de la somme annuelle globale de la réserve cumulée de 146,26 millions d'euros. Le reste va aux collectivités locales pour financer travaux et projets. Pire, en dehors du jaune budgétaire, il est impossible de connaître les réels circuits de financement des associations bénéficiaires. Combien d'associations chaque parlementaire finance-t-il ? Pourquoi ? Sur quels critères ? On ne peut pas savoir et cela fait des années que cela dure... Un clientélisme insupportable Quelles que soient les associations bénéficiaires, et le bien ou mal fondé de la subvention, il est totalement inadmissible sur le plan démocratique, que les parlementaires bénéficient d'un tel pouvoir. Il ne faut pas mélanger pouvoirs législatif et exécutif, c'est dans notre constitution ! Donc, le projet de loi dit de moralisation de la vie politique souhaite supprimer la réserve parlementaire. Très bien... Visiblement, il est prévu de la remplacer par un "fonds d'action pour les territoires et les projets d'intérêt général, transparent et soumis à des critères précis" dont on ignore tout. Ce sont les sénateurs qui sont vent debout contre cette suppression. Normal me direz-vous, ils doivent leur élection aux maires de leur circonscription dont ils arrosent largement les plates-bandes et plus si affinités. Le Mouvement associatif (qui représente les grosses associations) a souhaité, par un communiqué de presse publié le 13 juillet 2017 (2), exprimer ses inquiétudes : "Les associations ne doivent pas être les oubliées d'un dispositif qui les concernaient essentiellement, et payer le prix de cette réforme." Non, les associations n'étaient pas les principales bénéficiaires de la réserve parlementaire. Mais le Mouvement associatif nous a souvent donné l'habitude de pleurer avant d'avoir mal, quitte à jouer un peu avec la réalité... En savoir plus (1) Répartition de la réserve parlementaire en 2016 (2) Le communiqué du 13 juillet 2017 du Mouvement associatif Le jaune nous va si bien au teint ou qui connait le jaune budgétaire ?
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