Nous avons fait, la semaine dernière, un article sur la défiscalisation des dons accordés via le mécénat. Cet article a fait couler beaucoup d'encre. Les réactions n'ont pas manquées. Il est vrai que notre approche tranche totalement avec l'ensemble des soutiens que le mécénat a obtenu lors de la parution, par le ministère des finances, d'une note qui préconisait de diminuer de 50% la défiscalisation accordée actuellement aux dons en provenance du mécénat. Nous sommes totalement opposé au système mis en place en 2003 qui précise que le mécénat bénéficie d'une déficalisation à hauteur de 66% du don. Outre que, si mécénat il y a, celui ci devrait être totalement désintéréssé, donc sans l'aide de l'Etat (car il s'agit d'une privatisation de l'aide qui échappe à tout contrôle), on ne peut que s'étonner que les mécènes jugent scandaleux que l'Etat ose se désengager d'une affaire qui devrait être totalement privée. Car ne l'oublions pas, la défiscalisation se fait avec nos impôts, au même titre que la subvention. La différence entre les deux, c'est le contrôle que l'Etat peut faire de l'argent qui circule. Dans le cas du mécénat, en dehors de quelques déclarations de bonne "gouvernance" qui n'engagent personne (lire notre article de la semaine dernière - 1), il n'y a aucun contrôle véritable. Alors que les associations subventionnées sont elles, soumises à des contrôles strictes, sur présentation de comptes de résultats et de budgets prévisionnels qui demandent souvent la présence d'experts comptables qui ne sont pas gratuits, c'est le moins que l'on puisse dire... Et, comme en écho à notre position, cette semaine, le Figaro (2) fait paraître un article à charge contre les subventions accordées aux associations. Le titre de cet article est déjà tout un programme : Ces très "chères" associations ! En voici quelques extraits : 34 milliards d'euros de subventions sont accordées chaque année par l'État et les collectivités locales à 250.000 associations. Action sociale des administrations, festivals culturels, clubs sportifs, défense des minorités... À l'heure des restrictions budgétaires, enquête sur l'étonnante opacité qui entoure le financement public des associations. [...]Parfois, un montant vraiment plus élevé que les autres attire l'oeil. C'est le cas de l'Association nationale de formation professionnelle des adultes (Afpa) à laquelle l'État a donné très précisément 225.912.988 euros. Près de 226 millions d'euros! «Une aberration juridique», précise Viviane Tchernonog, l'une des rares chercheuses qui travaillent sur les associations, au CNRS et à l'université de Paris 1, car l'Afpa, bras armé de la formation professionnelle en France, n'a rien à faire dans ce document aux côtés d'une amicale bouliste ou d'une troupe de théâtre de rue. «Elle ne devrait pas figurer là, relève Mme Tchernonog, l'erreur devrait bientôt être corrigée.» Les subventions, elles, sont bien réelles!Aucune explication, aucune synthèse ne viennent égayer la monotonie de cet interminable répertoire. Toute l'aberration du système est là, dans cette accumulation d'informations inutilisables, ce saupoudrage de données, cette fausse transparence qui masque une volonté d'entretenir l'opacité.[...] Nous avons fait plusieurs articles sur le "jaune budgétaire" (3) et nous avons fait également remarqué son opacité. Mais, outre que ce document a le mérite d'exister, il doit être jugé pour ce qu'il est : une longue liste d'associations subventionnées. Un peu comme l'inventaire à la Prévert, on mélange tout sans précision d'aucune sorte. Mais pour qui veut de plus amples renseignements, il suffit d'éplucher les questions au gouvernement pour obtenir les détails nécessaires et ils ne manquent pas. Visiblement, le Figaro ne possède pas cette information. Poursuivons donc les citations de cet article "formidable"... Les fonctionnaires, premiers servis par l'État Charité bien ordonnée... l'État se sert royalement. Chaque ministère entretient à grands frais ses bonnes oeuvres, gérées la plupart du temps par les syndicats. Rien qu'à Bercy, l'Association pour la gestion des restaurants des administrations financières (Agraf) a reçu en 2010 un chèque de 10,3 millions d'euros. On comprend pourquoi toute tentative de sous-traiter la restauration des agents à un prestataire privé se heurte à un tollé syndical... L'Association pour le logement du personnel des administrations financières (Alpaf), qui possède un parc de plus de 10 000 logements dans toute la France, a perçu une subvention de 23 millions d'euros. Quant à l'Association touristique, sportive et culturelle des administrations financières, elle a touché 5,24 millions d'euros... On peut bien sûr s'étonner de l'enveloppe budgétaire accordée à ces associations. Bien que les chiffres, délivrés ainsi ne veulent absolument rien dire sans un budget attaché. Mais, on sent bien que le journaliste pense que le "privé" ferait mieux pour moins cher... Il nous semble donc utile de rappeler à cet étourdi ce que le partenariat public / privé coûte à la collectivité, c'est à dire à nous. L'hôpital de Corbeil-Essonnes En 2005, Xavier Bertrand, ministre de la Santé, donne son accord à la signature d'un partenariat public-privé avec le groupe Eiffage pour réaliser un vaste hôpital à Corbeil-Essonnes, ville dont le maire était à l'époque Serge Dassault (propriétaire du Figaro entre autre...) ; hôpital destiné à regrouper des structures médicales du sud de l'Ile-de-France. Plutôt que de payer un hôpital qui serait maître de ses murs, l'Etat se désengage et confie le chantier à Eiffage qui en assurera l'exploitation en louant le bâtiment au centre hospitalier sud-francilien pendant trente ans. La seule chose qui est certaine est le coût astronomique de cet hôpital puisqu'un loyer initial de 32 millions d'euros est prévu. En janvier 2011, le directeur de l'hôpital actuel assure la réception de l'ouvrage mais, très probablement inquiet des normes de sécurité sanitaire, il diligente immédiatement une expertise indépendante. Recevoir les clefs induirait de devoir payer le loyer d'un bâtiment inexploitable. Cette expertise met en lumière plus de 8 000 malfaçons dont certaines tout à fait considérables mettant en cause la sécurité des patients. Aujourd'hui, avec un loyer mensuel de 50 millions d'euros, cet hôpital qui n'est toujours pas capable de recevoir des malades doit payer le loyer. Il y de très nombreux autres exemples de ce type dont la construction du fameux "Pentagone à la française" voulu par l'ex président qui est actuellement bloqué pour des plaintes déposées sur la façon dont les contrats ont été signés entre le groupe Bouygues et l'Etat.. Non, le privé ne fait pas mieux. Sans cela, nous ne serions pas dans une telle crise financière dont la seule partie imputable aux Etats est bien d'avoir abandonné au privé les prérogatives qui étaient les leurs. Pour en revenir à cet article, il nous semble absolument aberrant que le Figaro vole au secours des "mécènes" à partir d'arguments aussi basiques. Dans le même temps, les chantres de la privatisation à outrance ne peuvent pas continuer à prêcher cette "bonne parole" là et demander de l'aide à l'Etat à chaque fois que la folie est allée trop loin... Inutile de rappeler ici les besoins des banques depuis 2008 et encore aujourd'hui. Le privé demande à l'Etat de se retirer de tout mais de payer l'addition quand ces "messieurs" se sont trompés. Il en va de même, pour nous avec le mécénat. Le retrait de l'Etat dans le financement des associations n'est qu'une posture idéologique qui s'avère aussi coûteuse que les subventions, le contrôle en moins. Depuis des années, il est demandé à l'Etat de n'être plus qu'une ambulance qui ramasse les blessés du combat que se livrent les financiers qui n'ont ni frontières, ni comptes à rendre à personne. Une association est subventionnée parce qu'elle répond à un besoin que l'Etat ne peut pas remplir. Il s'agit là d'un service pour le bien de la communauté. Le mécénat ne rempli pas ce rôle et s'il arrive parfois qu'il le remplisse, nous demandons que les mécènes acceptent de jouer le rôle qui était le leur lorsque ce mot a été utilisé pour la première fois : Mécène vient du nom d'un empereur romain au 1er siècle, MAECENAS, protecteur des artistes, des savants, des écrivains, etc.. Au 16eme siècle, il désigne un homme puissant, fortuné, qui aidait financièrement des hommes de lettres, des artistes... cela au nom de la culture, par passion, par simple générosité ou qui sait peut être même pour la notoriété. On en est loin ! En savoir plus (1) Faut-il sauver le mécénat ? - Lettrasso du 26-06-2012 (2) Ces très «chères» associations - Le Figaro du 29-06-2012 (3) Qui connait le jaune budgétaire ? - Lettrasso du 10-02-2009 La liste de toutes les subventions pour toutes les associations - Lettrasso du 19-04-2011
Voici le tag Internet à sélectionner, à copier et à coller sans transformation dans la page du site où vous allez utiliser cet article. D'avance merci.
Les associations coûtent trop cher ? Nous avons fait, la semaine dernière, un article sur la défiscalisation des dons accordés via le mécénat. Cet article a fait couler beaucoup d'encre. Les réactions n'ont pas manquées. Il est vrai que notre approche ... <a href="https://www.loi1901.com/intranet/a_news/index_news.php?Id=1879" target="_blank">Lire la suite sur Loi1901.com</a>
De la mission bénévole à la prestation de service
19-11-2024
La prestation de services n'a pas pour objet de transférer la propriété d'un bien matériel à la différence de la vente d'un produit. L'association ne reçoit rien et ne transmet
De l'équilibre des comptes pour une demande de subvention
Les comptes d'une association doivent-ils être équilibrés pour demander une subvention ? En fait, la réponse est beaucoup plus complexe qu'il n'y parait. Légalement, rien ne
Accepter la présidence d'une association : soyez prudent
Devenir président d'une association, quelle que soit sa taille, est tout à la fois un honneur et une charge. Les dispositions légales et statutaires qui encadrent les obligations
Panorama associatif numéro 113 : novembre 2024
12-11-2024
Le Panorama associatif de Loi1901 a pour objectif de vous détailler plusieurs mesures qui ne peuvent pas faire l'objet d'un article complet, à l'unité, car trop courtes. Au
Associations culturelles : le poids économique direct de la culture
Le poids économique direct de la culture, c'est-à-dire la valeur ajoutée de l'ensemble des branches culturelles, s'établissait à 47,1 milliards d'euros en 2022. Plus étonnant
Fédérations sportives : du rififi dans les licences
Les fédérations sportives, constituées sous la forme associative et au nombre de 122, ont pour objet l'organisation d'une ou plusieurs disciplines sportives, dont elles gèrent la
La comptabilité analytique est-elle utile aux associations ?
05-11-2024
La comptabilité analytique est utile, voire même indispensable, pour les associations dont le budget annuel dépasse les 80 000 euros. La "compta ana" est un mode de traitement des
Le bénévolat occasionnel : une source de problèmes ?
Derrière ce titre volontairement provocateur se cache une réalité qui commence à poser de sérieux problèmes au sein des structures associatives. Certes, selon une étude de
Le tribunal des activités économiques concerne aussi les associations
Les tribunaux des activités économiques a vu le jour par la loi 2023-1059 du 20 novembre 2023 (1). Ce texte a lancé, à titre expérimental, et pendant 4 ans, de la transformation
Gare au contrôle fiscal quand votre activité associative se rapproche trop de l'entreprise
29-10-2024
La lutte contre la fraude fiscale est un enjeu majeur pour le redressement des comptes publics. Une association peut, en vue de favoriser les échanges et les rencontres avec
Comment sortir de la crise démocratique : RAEF 2024 ?
Le Rapport Annuel sur l'Etat de la France 2024 du CESE (1) tente de mettre en lumière les liens entre inégalités sociales et démocratie. Même si l'on peut noter un léger recul de
Comme un plan social à bas bruit
Si le gouvernement refuse les 472 amendements déposés par les oppositions pour le budget 2025 et revient au texte initial avec un passage en force par 49.3, le secteur de
Contre la pauvreté, agir coûte moins cher que de ne rien faire
La pauvreté coûte un "pognon de dingue" disait le 12 juin 2018, le président Macron à ses conseillers et rapidement "fuité" sur @X, histoire de faire le buzz et de préparer les
De la subvention à la commande publique : fragiles associations
Les modèles socio-économiques des associations ont fait, par le passé, l'objet de débats importants. Mais aujourd'hui, elles semblent n'avoir que peu de place dans la Startup
Les faibles inégalités salariales au sein du secteur associatif
22-10-2024
Selon le baromètre des salaires de l'ESS, dans son édition 2024, le secteur associatif est marqué par de faibles inégalités salariales. Ce qui est plutôt remarquable. En revanche,
Le Service national universel ciblé par la Cour des comptes
15-10-2024
Le SNU, qui émarge au budget "jeunesse et vie associative", est expérimenté depuis 2019 pour une généralisation à tous les jeunes de 15 à 17 ans d'ici 2026. Mais la Cour des
Les dérives sectaires ne se reposent jamais
08-10-2024
Il n'y a pas de définition légale de la dérive sectaire. Mais la MIVILUDES (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) a élaboré une
L'association Anticor retrouve enfin son agrément
01-10-2024
Après plus d'un an de lutte devant la justice, Anticor a enfin retrouvé son agrément anticorruption. C'est par un simple arrêté que le 5 septembre 2024, Gabriel Attal a renouvelé
Inaction climatique : quand l'insuffisance entraîne la condamnation
24-09-2024
Nous assistons à la montée des eaux, à la fonte des glaces, à la multiplication des évènements météorologiques extrêmes, tandis que les espèces animales et végétales disparaissent
Relations avec l'administration : de nouvelles simplifications pour les OSBL
17-09-2024
Un OSBL est un Organisme Sans But Lucratif, connu également sous le sigle OBNL pour Organisme à But Non Lucratif. Il existe de nombreuses formes d'organisations à but non
Et si on réinventait le système des subventions aux associations ?
En septembre 2023, un collectif d'associations interpellait fermement la première ministre, Elisabeth Borne, avec un tonitruant "Le secteur associatif se meurt !". Au même
Quand la ruralité se réveillera
Et si l'heure n'était plus à l'attentisme dans les territoires ruraux ? Les élus comme les acteurs associatifs ont lancé, il y a plusieurs années déjà, une solide réflexion autour
Le succès du service civique
Alors que le SNU (Service National Universel) semble, à juste titre, vivre ses derniers jours, le Service Civique ne s'est jamais aussi bien porté. Créé par la loi du 10 mars
Quand un accord collectif est remis en cause
La nullité des conventions et accords collectifs de travail reste un contentieux rare et assez récent, ce qui s'explique, en partie, par l'objet traditionnel de ces actes qui est
Fonds de dotation : les temps changent
Le fonds de dotation est un organisme dit de "mécénat". Il est destiné à collecter des dons pour aider une structure à but non lucratif à réaliser une oeuvre ou une mission
Programmation 2021-2027 des fonds européens : place de l'ESS
Tous les sept ans, l'UE révise la stratégie d'attribution des fonds européens pour répondre aux nouveaux défis de l'Union européenne ainsi qu'aux enjeux des territoires et des
Loi ESS : une décennie de transformations pour un anniversaire en demi-teinte
2014 - 2024, la loi du 31 juillet 2014 relative à l'Économie Sociale et Solidaire, dite Loi ESS, fête ses 10 ans. Portée par Benoît Hamon, alors ministre délégué chargé de
L'économie sociale et solidaire dispose de son ministère
On ne connaît pas exactement la durée de vie du gouvernement Barnier. En revanche, nous pouvons saluer le fait que l'économie sociale et solidaire (ESS) retrouve un portefeuille
La franchise sociale ou l'art de cultiver l'intérêt général
La maîtrise de concepts comme l'utilité sociale, l'intérêt général ou encore l'utilité publique est absolument fondamentale pour le secteur associatif. Il est, à ce titre,
Financement d'une association : il faut utiliser les bons outils
Les créateurs d'une association pensent souvent qu'il suffit de demander des subventions pour démarrer. Sans un premier bilan de ses actions à présenter, une association n'aura