16-11-2010   LIBRE

Le fabuleux train de vie des sociétés de perception qui gèrent les droits des artistes

Cela ne vous aura pas échappé, cette information est à rapprocher de celle qui, cette semaine, traite de l'augmentation des droits d'auteur... Elle pourrait être en tous cas, un début de réponse. Selon le dernier rapport de la CPC SPRD (1) sur les sociétés de perception qui gèrent les droits des artistes et des producteurs, et plus particulièrement sur les rémunérations de leurs dirigeants, il en ressort des abus non sanctionnées, des dépenses abusives non effectuées dans l'intérêt de la société, et des salaires faramineux.

Ces sociétés vivent sur une rente, un quasi-monopole de fait sur le territoire national. Comment ces patrons de l'industrie du disque peuvent-ils justifier de conserver des rémunérations très élevées alors même que le marché de la musique s'est effondré de 50 % en cinq ans ?

Est-il envisagé une limitation en la matière ou tout du moins une régulation ou une répartition plus juste des rentes ainsi dégagées d'un quasi-monopole non sujet à la concurrence ?

Réponse du ministère publiée au JO le : 09/11/2010 (2)
Les sociétés de perception et de répartition des droits sont des sociétés civiles gérant des intérêts privés dont le régime dérogatoire aux règles posées par le code civil sont inscrites au titre II du livre III du code de la propriété intellectuelle.

Ces sociétés qui ne poursuivent aucun but lucratif agissent pour le compte et dans l'intérêt de leurs membres à qui il revient de veiller à leur bon fonctionnement au moyen des décisions collectives et des pouvoirs de contrôle interne qui leur sont reconnus.

Afin d'améliorer la transparence au bénéfice des associés tout en prenant en compte leur nombre particulièrement élevé(3), la loi du 1er août 2000 aligne le régime du droit d'accès à l'information des associés des sociétés de perception et de répartition des droits sur celui des associés des sociétés civiles. Ces dispositions se référent à l'article 1855 du code civil et sont reprises à l'article L. 321-5 du code de la propriété intellectuelle.

Le ministère de la culture et de la communication a complété, par le décret n° 2001-334 du 17 avril 2001, ce dispositif en établissant des règles définissant les modalités d'exercice du droit d'accès à l'information des associés.

Ces règles prévoient la liste des documents communicables, le mode de communication et, en application de l'article R. 321-6-3 du code de la propriété intellectuelle, la création, au sein de chaque société, d'une commission spéciale de recours que tout associé peut saisir en cas de refus de communication.

La loi du 1er août 2000 contient également des dispositions spécifiques pour renforcer et compléter le contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits notamment en créant la commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits.

Ces dispositions reprises à l'article L. 321-13 du code de la propriété intellectuelle prévoient que la commission contrôle les comptes et la gestion des sociétés de perception et de répartition des droits et de leurs filiales. Elle présente un rapport annuel au Parlement, au Gouvernement et aux assemblées générales des sociétés de perception et de répartition des droits.

Le dernier rapport traite en particulier de la politique salariale et des rémunérations au sein des sociétés de perception et de répartition des droits.

En application de l'article L. 321-12 du code de la propriété intellectuelle modifié par la loi n° 2006-961, le ministère de la culture et de la communication, en collaboration avec le Conseil national de la comptabilité et la commission permanente de contrôle a travaillé à l'harmonisation comptable des sociétés de perception et de répartition des droits pour faciliter le contrôle de la commission, ce qui a abouti à la publication du règlement n° 2008-09 du 3 avril 2008 homologué par l'arrêté du 11 décembre 2008 du Comité de la réglementation comptable.

Concernant la préoccupation relative aux salaires des dirigeants des sociétés de perception et de répartition des droits, il n'appartient pas au ministère d'exercer un contrôle sur ces revenus.

Dans le strict cadre de ses missions prévues aux articles L. 321-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle, et notamment dans le contrôle des statuts, des règlements intérieurs ou des décisions des organes sociaux le ministère n'a pas constaté de dispositions illégales relatives à la rémunération des dirigeants des sociétés de gestion collective des droits voisins.

De même, les rapports devant être transmis par les commissions spéciales prévues à l'article R. 321-6-3 du code de la propriété intellectuelle à la commission de contrôle et au ministère ne font pas ressortir d'anomalies.

Les développements sur ce sujet de la part de la commission permanente de contrôle relèvent de son appréciation autonome.

Il revient donc aux associés de suivre l'évolution des revenus des dirigeants des sociétés de perception et de répartition des droits en utilisant pleinement les pouvoirs de contrôle interne qui ont été récemment renforcés par les textes.

Il faut relever qu'hormis la limite liée aux demandes répétitives ou abusives de l'article R. 321-6-2 du code de la propriété intellectuelle et celle liée à l'accès au montant des droits répartis individuellement à tout autre ayant droit prévue à l'article L. 321-5 du code de la propriété intellectuelle, l'étendue du droit d'accès des associés est très large.

L'article R. 321-6-1 du code de la propriété intellectuelle précité prévoit l'accès, dans les deux mois précédant l'assemblée générale annuelle, au montant global certifié exact par les commissaires aux comptes, des rémunérations versées aux personnes les mieux rémunérées, le nombre de ces personnes étant de dix ou de cinq selon que l'effectif de la société excède ou non deux cents personnes.

La commission spéciale relative au droit d'accès dont le ministère a, depuis 2001, vérifié la création effective au sein de chaque société doit également rendre compte annuellement de son activité à l'assemblée générale, ce qui favorise l'information des associés.

En savoir plus
(1) CPC SPRD : Commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits est une commission de contrôle instituée par l'État français et chargée de contrôler les comptes et la gestion des SPRD, de leurs filiales et des sociétés qui leur sont affiliées.
Liste des rapports annuels de la CPC SPRD à la cours de comptes.

Extraits du rapport de la CPC SPRD :
- ...Entre 2000 et 2008, les charges de gestion augmentent de 32 %, et donc moins vite que les perceptions (+ 35,2 %). Cependant, au cours de la période 2004/2008, le mouvement s'inverse avec des charges de gestion qui progressent plus vite que les perceptions (+ 13 % contre + 5,6 %)...

- ...En 2008, les droits primaires reçus par l'ensemble des sociétés se montent à 1 259,02 M€. Les droits primaires reçus par les seules sociétés intermédiaires représentent quant à eux 407,86 M€, soit un tiers des perceptions primaires, ce qui est très substantiel. Le nombre élevé des sociétés et leur superposition suscite ainsi de nombreux flux intermédiaires ou croisés entre elles. Ce schéma est d'autant plus complexe que, comme la Commission l'avait déjà souligné dans son rapport 20065, une ou plusieurs sociétés peuvent s'interposer entre celle qui perçoit les droits primaires et celle qui les répartira. A titre d'illustration, les droits perçus par la SORECOP sur la copie privée sonore sont affectés à l'ADAMI, à la SPEDIDAM, à la SCPA et à la SDRM. Cette dernière en affecte une fraction à son tour aux sociétés d'auteurs : la SACD, la SACEM et la SCAM, tandis que la SCPA opère un reversement à la SCPP et à la SPPF....

- ...L'existence de ces flux croisés emporte des conséquences sur la présentation des données dans le tableau des flux financiers. Il est en effet exceptionnel que les montants inscrits dans les comptes de la société A comme ayant été versés à la société B, correspondent à ceux que la société B fait figurer dans ses comptes au titre des perceptions reçues de la société A...

- ...La SACEM a connu une progression de sa trésorerie de 11,2 % entre 2006 et 2008 (équivalente à la moyenne constatée globalement pour l'ensemble des sociétés), alors que, dans le même temps, ses perceptions n'augmentaient que de 0,22 %. La société explique cette forte augmentation pour des raisons conjoncturelles et structurelles...

(2) Question posée par M. Patrice Calméjane (député UMP - Seine-Saint-Denis) à M. le ministre de la culture et de la communication.

(3) 27 sociétés chargées de la gestion collective des droits d'auteur et des droits voisins. Un bon et beau gateau de 1,2 milliard d'euros en 2006...

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Le fabuleux train de vie des sociétés de perception qui gèrent les droits des artistes 
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